INCIDENT TECHNIQUE SUR LA LIGNE D

On nous avait dit : « N’y allez pas ce dimanche, il y a avis de tempête, vous risquez de recevoir un arbre sur la tête ! »
Nous sommes partis quand même, tassés et comprimés dans la Fiat de Sophie. Si l’on compte pour rien les outils, les plants de pins et de feuillus, les vêtements de pluie, bottes et pique-nique, nous étions cinq déterminés à affronter les éléments déchaînés.
Le Président Simone était heureux de retrouver ses vastes étendues médocaines, de respirer le « bon air » en l’absence de ses amis les chasseurs.
La Secrétaire Sophie tenait à s’assurer que rien de mémorable ne se passe en son absence et sa fracture de côte ressoudée lui permettait de s’esclaffer sans appréhension.
Stéphane le Carreleur était toujours disposé à donner un coup de main, prêt à tous les coups fussent-ils tordus.
Florian l’Archéo venait pour la première fois planter, habitué au travail de plein air il voulait donner de sa personne. Il ne sera pas déçu. Et j’étais là moi-même avec, attirail complémentaire, la machette et la trousse de secours.

Prétendre qu’il faisait beau ne serait pas honnête mais, enfin, ce n’était pas l’ouragan annoncé. L’accueil de la forêt fut tout à fait sympathique. Au bord de la piste trois chevreuils nous ont regardés longuement avant de reprendre leur course aventureuse. Nous étions à pied d’œuvre à 12h30. L’heure était tout d’abord de déjeuner et nous avons déballé moult victuailles dont le fameux greniermédocain et l’indispensable pain gascon. (cf les épisodes précédents).

A notre programme de l’après-midi nous avions la révision des lignes C et D de la parcelle. Nous pensions, comme d’habitude, aller assez vite mais il s’est avéré que ces lignes n’avaient pas été achevées au printemps, la D notamment. Il nous a donc fallu planter et surtout dépresser des pins maritimes touffus et débroussailler ce qui prend pas mal de temps. La molinie est encore coriace en décembre.
L’humeur était bonne car, malgré tout, les parasols avaient bien pris le double ou le triple de leur taille initiale et avaient survécu à la sécheresse de la fin de l’été.
La journée se déroulait harmonieusement et nous faisions des projets pour la soirée. Vers 16h15, coup de théâtre, Sophie, arrivée en courant, nous apprend que Florian est blessé. Il a reçu de son collègue un coup de houe malencontreux sur le pied. Il perd son sang à grands flots. Nous nous précipitons et constatons les dégâts : la botte est hors d’usage.
Il nous faut cesser le travail aussitôt, car sous la botte il y avait une cheville qui présente une belle plaie, bien nette et saignante. Clopin-clopant Florian est conduit à la voiture. Il fait bonne figure malgré la douleur. Il est décidé de faire route vers la clinique de Lesparre, la plus proche et vraisemblablement moins sollicitée que les urgences de Pellegrin. Sur place, nous devons vite déchanter car d’autres éclopés ont fait le même raisonnement et une foule de malheureux remplit le couloir. Curieusement aucun infirmier n’est là pour trier les entrants, pour repérer les cas vraiment inquiétants. Non, une secrétaire reçoit dans l’ordre d’arrivée les patients pour remplir tout d’abord un interminable dossier avant de les confier à un personnel médical invisible. Nous sommes là depuis un quart d’heure, il n’est pas possible de présumer pour combien de temps nous en avons, entre 25 minutes ou trois heures, et une ambulance des pompiers survient là-dessus. D’évidence nous ne passerons pas avant tard dans la soirée. Je propose alors de suturer la plaie à mon cabinet et nous rembarquons sans plus attendre et sans, d’ailleurs, que personne des urgences ne s’en inquiète. Vers vingt heures l’affaire est réglée, Florian réparé reprend sa bicyclette. Il se sent parfaitement bien. Le lendemain soir j’apprends qu’il est allé se faire faire un rappel antitétanique chez son toubib, comme prévu, qu’il lui a signalé qu’il avait mal à la cheville. Une radio a été pratiquée qui a révélé une entorse. Florian est reparti avec une attelle pour trois semaines. Funeste journée pour l’Archéo ! N’empêche nous n’avons, une fois de plus, pas achevé la révision des lignes de cette fichue parcelle numéro un de Hourtin. Cela fait près de deux ans que nous travaillons ici. Il nous reste 249 kilomètres à planter. Le calcul est vite fait ; à cette allure nous en avons encore pour 500 ans !

 

par Olivier F. Léonard – Décembre 2007

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